Chronique d'une Haine Ordinaire

Nous sommes le mercredi 14 septembre 2012, il est 20h30, c'est la première de :
- Chronique d'une Haine Ordinaire
- La saison du théâtre de la Manufacture
- Pièce de l'année (théâtrale) que je vais voir. 

Ah, oui c'est aussi la première fois que je vais dans la salle toute rénovée du théâtre et la première fois que je vais entendre du Desproges et voir une mise en scène de Michel Didym.
Ça fait beaucoup de premières si on compte.




Tout d'abord ce spectacle est l'occasion de découvrir un auteur que je ne connais que de nom, qu'on cite souvent dans les médias et qui inspire à tous un certain respect, Pierre DESPROGES.
Dès les premières phrases, j'ai eu envie de découvrir cette écriture qui comme le dit Michel Didym est "à la jonction (...) du classicisme français dans ce qu'il a de plus écrit, et rejoignant soudainement une fulgurance presque insolente"

J'ai senti tout au long de la pièce, se dégager une ambiance de confort et de chaleur, on s'y sentait bien, et les deux actrices/personnages y contribuent largement. On a l'impression de les avoir toujours connues, avec leur langues bien pendues, elles forment un peu un tandem à la Laurel et Hardy mais au féminin.
Elles racontent, nous interpellent, chantent, esquissent des pas de danse, jouent du piano. 

Dominique Valadié et Christine Murillo

Ce qui se dégage de la pièce c'est ce contraste entre la légèreté de la forme et du jeu et le sujet "la haine ordinaire". Bien sûr on rit beaucoup dans cette pièce, c'est l'histoire de l'inventeur de la languette rouge de la "vache qui rit" voici l'extrait qui a retenu mon attention :

"Un psychanalyste vous dirait sans doute que ce type - le type qui a inventé l'espèce de fil rouge autour des portions de crème de gruyère - a des tendances sadiques. Il est vrai que cette idée incroyable de faire des nœuds coulants à des laitages qui ne vous ont rien fait peut à première vue relever d'une certaine forme de perversion. Mais bon. Ça ne prouve pas que ce type soit un sadique. Le vrai sadique, pour avoir son plaisir, il faut qu'il assiste de visu à la douleur de l'autre. Mais lui, le type qui a inventé l'espèce de fil rouge autour des portions de crème de gruyère, il n'est jamais là pour se rincer l'oeil quand je me relève affamé à trois heures du matin avec, au ventre, l'espoir insensé de me faire une petite tartine de crème de gruyère...
Alors, qui est-il ? Peut-être qu'il m'entend. La haine aveugle n'est pas sourde. Peut-être qu'il est dingue, ce type. Peut-être qu'il est dingue de père en fils. Si ça se trouve, c'est une forme d'aliénation mentale plus ou moins héréditaire. Peut-être que son père, c'est le type qui a inventé l'espèce de papier collant autour des petits-suisses ? Peut-être que sa mère, c'est la *** qui a inventé le chocolat dur qui tient pas autour des esquimaux ? Peut-être que son grand-père, c'est le fumier qui a inventé la clef qui casse le bout des petites languettes des couvercles de sardines, en complicité avec le pourri qui met de l'huile jusqu'à ras bord des boîtes ?"

Je cite également cet extrait pour faire le lien avec le genre de la chronique, j'ai trouvé intéressant de transposer sur scène quelques chose qui est avant tout fait pour être écouté, il est vrai que par moment on pouvait être tenté de fermer les yeux et de se laisser porter par le texte, c'est aussi peut être pour cela qu'on se sentait si bien dans la salle peut être parce qu'on avait l'impression d'être assis dans son fauteuil à écouter la radio.
Enfin Desproges ce n'est pas seulement une réflexion un peu triviale sur la languette de la vache qui rit, c'est aussi l'évocation du nazisme, de la recherche du bonheur, en somme des réflexions, des Chroniques d'une Haine qui ne devrai plus être ordinaire ...






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