Les Trois Soeurs.

Nous sommes le mercredi 1 février 2011, et ce soir à la Manufacture, on joue Tchekhov, Les Trois Sœurs. Adaptation et mise en scène Michel Dezoteux.

RÉPÉTITIONS ...



J'avais vraiment hâte d'aller voir cette pièce, elle tombait à point nommé. En effet au conservatoire nous travaillions au même moment sur La Mouette et j'avais du mal à me représenter réellement l'univers de Tchekhov, il fallait que j'arrive à matérialiser l'idée abstraite que je me faisais de son théâtre.

Les trois sœurs !


Ce à quoi je me suis d'abord le plus attaché c'est le jeu des acteurs et l'intention. En effet je trouve que Tchekhov  est très difficile à jouer dans le sens où on peut vite tomber dans un espèce de ton niais, ou bien à l'inverse une sorte d’emphase, surtout lorsqu'il s'agit de scènes entre amants ou entre mère et enfants. Je pense à cette scène par exemple, parmi d'autres :

"OLGA. La voilà qui vient.
Entre Macha.
VERCHININE. Je suis venu prendre congé...
Olga s'écarte un peu pour ne pas gêner les adieux
.
MACHA, le regardant dans les yeux. Adieu!
Un long baiser.

OLGA.
Voyons, voyons...
Macha sanglote fort.

VERCHININE.
Écris-moi... N'oublie pas ! Laisse-moi... il est temps... Olga, prenez-la, il me faut... Il est temps... je suis en retard...
Très ému, il baise les mains d'Olga, puis étreint Macha encore une fois et sort rapidement.
OLGA. Macha, voyons! Arrête, ma chérie...
Entre Koulyguine.
KOULYGUINE, troublé. Ça ne fait rien, laisse-la pleurer, laisse... Tu es ma petite Macha, ma bonne, ma gentille Macha... Tu es ma femme, et quoi qu'il arrive, je suis heureux... Je ne me plains pas, je ne te reproche rien, rien du tout... tiens, Olga en est témoin... Nous allons commencer à vivre comme avant et, de ma part, tu n'entendras pas le moindre mot, pas la moindre allu­sion...
MACHA, retenant ses sanglots. Au bord d'une baie un chêne vert, autour du chêne une chaîne d'or... autour du chêne une chaîne d'or... Je deviens folle...
OLGA. Calme-toi, Macha... Calme-toi... Donne-lui un peu d'eau.
MACH A. Je ne pleure plus."

J'ai été admirative du ton juste et simple que donnait les acteurs au texte, il résonnait parfaitement, de quoi nourrir notre travail au conservatoire. Ensuite, je me suis attachée à l’harmonie que dégageait la pièce, bien sûr l'écriture des Trois Sœurs fait que chaque personnage est singulier et dégage une énergie qui lui est propre. Cependant ils sont tous plus ou moins rejoins par leur malêtre et leur névroses de petits bourgeois, cela les enveloppent et en résulte une certaine harmonie qu'on ressent aussi dans le décor; cette moquette au sol m'a fait penser à un cocon, comme une bulle dans laquelle ils étaient tous enfermés et ne pouvaient jamais en sortir. Une harmonie qui transparait aussi par ces trois sœurs complémentaires, qui forment une sorte de trio parfait. Enfin je dirais que cette pièce est complétement intemporelle. Cela ce voit à travers les éléments de décor puisque les personnages évoluent dans un univers très "Rétro" à la fois dans le mobilier ( Un Juke-box en guise de cadeau d’anniversaire !), mais aussi dans les costumes. Intemporelle, aussi, dans les thèmes abordés : celui d'un ailleurs meilleur, des rêves d'avenir symbolisées ici par la ville de Moscou; mais aussi par l'évocation des tourments sentimentaux et des relations familiales complexes. Pour reprendre Michel Dezoteux "Ces Trois sœurs ne sont ni du XIXème siècle, ni d'aujourd'hui. Tchekhov n'a pas besoin d'être modernisé: il est notre contemporain !"



Enfin je terminerai par quelques éléments de mise en en scène que j'ai apprécié, car ils créaient une proximité avec le public et une identification aux personnages  : le fait que les acteurs utilisent les portes d'entrée et de sortie du théâtre sur les côtés et aussi l'impression d'être avec eux dans leur maison au centre des discussions familiales et des chansons du Baron !


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